BMS quand tu nous tiens !!!

Stage Chef de Bord à Paimpol du 13 au 19 avril 2013.

Belle semaine, du soleil, du vent, de la mer mais pas trop, une équipe sympa à bord et un cadre exceptionnel … que demander de plus.

Pourtant la semaine à Paimpol ne s’annonçait pas vraiment folichonne le BMS 112 prévu pour la nuit de samedi à dimanche, un bon 6 beaufort prévu pour le dimanche et pétole ou quasi pétole le reste de la semaine. C’était un casse tête organisationnel. Partir vers l’est en profitant du vent de sud-sud-ouest prévu et revenir en plantant des pieux face au vent ou au moteur dans la baie de Saint Brieux ou partir vers l’ouest en faisant du rase caillou au prés pour ne pas avoir trop de mer.

Ajoutez à cela des coefficients de marée en berne qui nous interdisent tout port à écluse, le problème n’était pas simple.

Après tout, pourquoi je déciderais moi-même ! C’est un stage Chef de Bord : ils vont se démerder. J’avais bien sûr ma préférence mais je l’ai gardé pour moi.

Première question : sortie le samedi soir ou le dimanche matin ? Là, ne connaissant pas l’équipage, j’ai un peu forcé la main. Ce sera sortie le dimanche. Personne n’avait envie de commencer par une navigation de nuit puis de se faire remuer toute la nuit au coffre.

On a bien fait, ça a sacrément soufflé dans la nuit. Cela permettra en plus de bien préparer la navigation du lendemain. C’est Guillaume qui sera notre guide pour la journée. Au programme, quelques bords en face, le Ferla, quelques exercices dans l’Anse de Pomelin et prise de coffre dans le Trieux pour la nuit.

Guillaume est un homme prudent, médecin, il n’a pas emmené la table d’opération mais presque, la taille de son sac à dos en témoignait. Je ne me suis jamais senti autant en sécurité, il y avait de quoi faire des attelles, des médoc pour tout, etc…

Une fois les voiles établies nous voilà devant le premier choix, chenal de la Trinité, celui du Denou, celui de Saint Rion ou directement à l’est sans vraiment d’obstacles ni de navigation. Le choix se pose sur le plus étroit : Saint-Rion, le départ est sacrément étroit mais Guillaume se débrouille comme un chef. Juste un stop and go avant de s’engager pour bien tout vérifier et roule.

Un premier HLM une fois sorti, y a du boulot.

Contrairement à ce qui était annoncé le vent est plus sud-ouest que sud, il nous faudra donc tirer des bords dans le Ferla, c’est un bon moyen de réviser les alignements, la visibilité est bonne et c’est un vrai plaisir de repérer les têtes de roches juste émergées avec la hauteur d’eau calculée. Nous prenons laborieusement un coffre devant Loguivy pour déjeuner, les 5.7 de l’île verte viendront nous y rendre visite et nous saluer, il y a du vent et sous voile il n’y a que les Glénans.

L’après-midi, exercice de Quick-Stop dans l’anse de Pomelin, pas facile avec du vent de s’arrêter juste sous le vent du seau et de son compagnon d’infortune : le pare battage. J’ai en fait plus de mal à expliquer la manœuvre à des stagiaires expérimentés qu’à des débutants. Tous ayant de fortes personnalités (stage Chef de Bord oblige), chacun ayant un vécu maritime important, il est plus difficile de planter un coin dans les certitudes. Il faut que je travaille cela.

D’ailleurs l’équipage m’a inconsciemment et subtilement signifié qu’il en avait marre de cet exercice en paumant la gaffe, que l’on ira récupérer … au moteur.

Une fois tout le monde passé à la barre il est l’heure d’aller chercher un coffre à l’abri pour la nuit dans le Trieux, il est encore assez tôt mais le courant s’inverse et tirer des bords infinis vent et courant contre n’enchante personne. Le gros coffre devant Coz Castel sera notre hôte pour la nuit bien au calme.

Photo Bernard Bauque

Mouillage dans le Trieux – Photo Bernard Bauque

Pendant notre première journée Eole a décidé de changer ses plans et de souffler et souffler encore, les BMS vont s’égrainer toute la semaine 112, 113, 114 … jusqu’à 122 le jeudi.

Lundi c’est le tour de Philippe, notre papi du bord – il a à peine cinq ans de plus que moi mais il en faut un. Nous visons Trebeuden avec une escale à Port Blanc pour le midi, mais cela risque d’être un peu long. Nous envoyons le spi dans le Trieux jusqu’à l’alignement pour le chenal de la Moisie. C’est l’occasion de faire un affalage d’urgence (sans génois) au cas où quelqu’un tombe à l’eau.

Les éléments nous obligent à réviser les fondamentaux, prises de ris et changement de voiles d’avant dans la brise. Tout le monde s’y colle avec enthousiasme.

Philippe pilote le bateau de main de maître et je peux me consacrer à l’observation de Guillaume et de sa ligne de traîne et m’imaginer le festin qu’il nous a promi pendant une semaine et qui n’est jamais venu – sacré Guillaume.

Port Blanc n’est pas facile à trouver à contre jour, mais ce sera fait sans problème. L’après-midi nous recommençons à tirer des bords et bien vite il faudra se rendre à la raison : Trebeuden ne sera pas pour ce soir.

Ca permet de visiter, un coup les sept îles, un coup Perroz-Guirec, un coup les sept îles, un coup Perroz Guirec, bon ça va, le courant diminue et nous atteignons Tregastel. Ca déferle sur le Tareau et l’entrée est très impressionnante. Nous allons nous planquer le plus loin possible au fond de la baie.

Une fois le coffre pris on revérifie le calcul de marée, on est encore à marée montante, la houle d’ouest rentre et on se fait remuer désagréablement. On a bien pensé repartir mais pour aller où ? Par sécurité nous déplacerons le bateau pour un mètre d’eau en plus, pas vraiment utile mais on ne sait jamais. Le point le plus critique est à marée basse, mais à marée basse la houle ne rentre plus.

Cela remue sacrément, mais il faut faire à manger, comme je suis le seul vraiment bien amariné je m’y colle avec joie, j’aime bien cuisiner. Nous passerons une nuit sereine et nous recommencerons à bouger au réveil. Nous apprendrons plus tard dans la semaine que Philippe a été moniteur aux Glénans, franchement cela ne m’étonna pas, serein, directif et calme, tout pour un bon chef de bord.

Bernard se porte volontaire pour nous guider le mardi. J’ai rencontré Bernard il y a huit ans sur un stage Horizon, j’étais stagiaire comme lui, il faisait son premier stage aux Glénans et Petra et moi notre second stage sous la gouvernance de François. François nous répétait à longueur de journée que la navigation c’est 95 % du temps dehors et 5 % dedans. Bernard faisait exactement l’inverse à tel point qu’on l’avait surnommé « Bernard l’ermite ». Bernard, tu m’as fait un plaisir immense en venant sur mon bord, comme moi tu as fait énormément de progrès depuis huit ans, et tu n’a plus rien d’un ermite, j’espère te revoir bientôt.

Bernard doit nous emmener au nouveau port de Roscof – Bloscon. Un bon chef de bord doit se soucier de l’hygiène de l’équipage, ça commence à foiner dans le carré et une douche serait la bienvenue.

Un grand bord babord amure nous emmènera à proximité du phare du Triagoz, un bord tribord amure jusqu’à la côte et nous avons fait un demi mille vers l’ouest, un autre bord babord et re le phare, on est pas arrivé. Et le vent qui tombe et la pluie qui s’en mêle et tout le monde de s’en prendre au chef de bord en rigolant bien sûr.

Il pleut, il fait froid, y a pas de vent, y a pas de poisson au bout de la ligne, on tire des bords carrés, hé m… !!! Il est temps de manger. Le vent revient après l’étale, on tire quelques bords direction l’île de Batz, puis il retombe. Un demi nœud sur le fond, on a six milles à faire, Volvo au secours !!! On en a tellement marre de cette météo que lorsque le vent revient on reste au moteur pour les deux milles qui restent. La manœuvre de catway se fera avec 15 nœuds de vent, un comble. Le soir on regardera la trace du bateau sur le téléphone de Guillaume et on verra un gros gribouillis au sud du Phare des Triagoz.

Le cadre d’un port tout neuf en chantier est assez rebutant, mais à Roscof l’accueil est tellement sympa que cela fait oublier complètement le cadre. La douche est bien chaude, les employés du port sont serviables et souriants, les bateaux des Glénans ont en plus 50 % de réduction : le paradis. Un bon repas, le plein d’eau, une bonne soirée tous ensembles dans un bateau bien à plat et une bonne nuit de sommeil.

Photo Bernard Bauque

Run Na Mara, le RM 10.60 de la base de Paimpol – Photo Bernard Bauque

Mercredi, Gérard nous prépare le café avec sa cafetière perso. Un truc d’un mètre cube qui marche au 220. Quand j’ai vu arrivé ça sur le bateau le samedi, j’ai crû que c’était une blague, mais non, Gérard tient à sa cafetière. Au mouillage, la rallonge étant trop courte, Gérard fait chauffer de l’eau dans la bouilloire et la verse dans le filtre de sa cafetière. J’ai bien un bout de deux mètres dans ma poche pour faire des nœuds, Gérard, lui, il a une cafetière, chacun son truc.

Il fait beau, c’est l’heure de remettre le nez vers Paimpol, le vent de sud-ouest nous promet un long long bord de spi. Une fois le café bu nous partons vers neuf heures et justement c’est Gérard à la carte. Après quelques hésitations en sortant du port nous passons au sud du Plateau des Duons, puis le champ est libre devant nous en faisant tout de même attention aux Trépieds et à la Méloine.

Nous ne tardons pas à envoyer le pépin. Le bateau avance bien, il y a du vent qui monte et nous ne sommes pas long à laisser le phare des Triagoz par notre babord, ça change de la veille. L’île aux Moines est juste en face. Nous décidons de longer les îles au plus près par le sud pour visiter et aller admirer les Fous de Bassan sur l’île Rouzic. Quel spectacle, tous ces volatiles qui ne foulent jamais que la partie est de l’île qui est complètement pelée alors que la moitié ouest est couverte d’une herbe bien verte où les oiseaux ne se posent jamais.

Photo Bernard Bauque

Ile Rouzic – Photo Bernard Bauque

Déjà l’île est derrière nous et s’éloigne, le vent forcit et refuse, l’équipage prend plaisir sous spi. J’explique quelques points de navigation à la table à carte, lorsque le bateau part au lof. Tellement en confiance avec cet équipage, je n’ai même pas sorti la tête dehors pour voir. Ils gèrent, c’est vraiment cool.

On a faim, on affale pour déjeuner, il y a de la mer, et du vent, c’est plus serein comme cela. En plus nous sommes partis un peu au large et il nous faut serrer le vent pour revenir à la côte vers l’embouchure du Jaudy.

Nous laissons la Basse Crublent à babord, le phare de La Corne à tribord puis nous embouquons le passage de la Gaine au portant, l’alignement du Mur n’est vraiment pas évident même par beau temps, nous contemplons le phare des Héaux de Bréhat par le sud ce qui n’est pas courant pour moi.

Photo Bernard Bauque

Le phare des Héaux de Bréhat – Photo Bernard Bauque

Ensuite nous filons tout droit sur Bréhat par la Moisie, la Chapelle Saint Michel et l’amer du Rosédo nous guident amicalement. Nous traversons le Trieux et nous filons pour une escale technique à La Corderie, il n’y a plus de pain à bord et surtout plus d’apéritif.

Il y a un joli coffre sur une eau plate juste à l’entrée, il fait beau, on est bien à l’abri, cela souffle dehors, on refait le calcul de marée pour voir et on décide de rester là pour la nuit, c’est l’avantage des faibles coefficients, l’eau ne descend pas beaucoup.

Photo Bernard Bauque

La Corderie à Bréhat – Photo Bernard Bauque

On gonfle l’annexe et les six gaillards du bord embarquent tous en même temps pour une petite partie de rame. On est pas long à rejoindre le bord, je suis heureux d’avoir gardé mes bottes, l’eau est froide.

Photo Bernard Bauque

La Corderie à Bréhat – Photo Bernard Bauque

Nous ferons une très belle balade sur l’île jusqu’au village. Les courses faites, une terrasse ensoleillée nous tend les bras pour un repos bien mérité. Au retour nous prendrons encore plus notre temps, on a rien qui nous presse. Nous montons jusqu’à la Chapelle Saint Michel pour la remercier et surtout embrasser toute l’île de son point culminant.

Photo Bernard Bauque

Vue sur l’archipel de Bréhat – Photo Bernard Bauque

Bon sang, que le coin est mal pavé ! Mais en fait je me demande si la navigation n’est pas plus simple ici, chaque caillou constitue un amer s’il est correctement identifié sur la carte. En tout cas on a beaucoup plus de choses à voir et à disposition pour nous aider à naviguer. C’est autre chose qu’avec des bancs de sable dont on sait jamais où ils commencent et où ils se terminent.

Photo Bernard Bauque

Run Na Mara au mouillage – Photo Bernard Bauque

Le jeudi matin, BMS 122, vent de sud-ouest virant ouest force sept dans l’après-midi. Stanislas a la charge de nous ramener au port à une heure du matin dans la nuit suivante, coefficient 34, 7,60 mètre d’eau à marée haute pour un seuil à 5,50. Tout cela de nuit avec peut-être pas mal de vent, il ne faut pas trop déconner.

Nous décidons d’aller jusqu’à l’anse de Bréhec pour déjeuner. Bien au fond nous y serons à l’abri. D’abord contre le vent dans le Trieux, le Ferlat ne sera qu’un souffle. Nous nous ferons pas mal remuer en face de Paimpol, j’en profite pour balancer le seau-pare-bat. Il y a du vent, de la mer, ce n’est pas simple.

Photo Bernard Bauque

Anse de Bréhec – Photo Bernard Bauque

Sur une erreur d’écoute de grande voile choquée trop top, nous voilà partis au portant pleine balle sur le futur noyé-broyé-achevé, on est carrément passé dessus, et il n’est pas ressorti. Il est accroché où, les quilles, le z-drive. Interdiction de pousser la manette du moteur qui est en route. Bateau face au vent pour le faire culer. Et le seau-pare-bat ressord, ouf !! J’ai bien mon masque et mon tuba mais, je n’avais pas très envie de plonger. En plus avec la mer cela risquait d’être dangereux.

Ce petit incident passé, j’ai rangé l’objet du délit, un petit débrief sur les sur accidents possibles etc… Décidément j’aurai été mauvais sur le quick-stop cette semaine.

Nous plantons des pieux pour aller mouiller à Bréhec. Un bon petit repas avec quelques restes. Carottes aux lardons, simple, efficace, réconfortant et c’est super bon.

Il est temps de repartir on va quand même pas faire une sieste le dernier jour. Stanislas nous emmène pour un tour de l’île Saint Rion, le plan est de revenir dîner juste au sud de la Pointe de Plouézec avant de rentrer sur Paimpol.

Nous tirons bientôt des bords dans la baie de Paimpol pour rejoindre le chenal de la Trinité. Tout à coup, nous nous trouvons en face d’un nid de bouées de casiers à homard. Il y en a partout, on a pas d’autre choix que de passer au travers pleine balle sous voile, c’est trop tard pour virer. Je ne comprend pas trop, on est en plein dans l’alignement d’entrée de Paimpol. C’est quoi ce truc ? On passe sans rien accrocher. Puis plus rien, pas une bouée, je regarde derrière : une forêt de bouée. Ne cherchez pas à mettre un casier là, c’est pas la peine, y a plus la place. Un HLM à homard ou à crevettes ou je ne sais quoi. Je vais voir la carte et je comprend de suite, juste à cet endroit, il y a un trou, tout autour c’est l’estran. C’est donc un piège naturel à crustacés. Cet endroit n’est pas bon de nuit, il faut trouver une solution pour ce soir.

Stanislas nous guide parfaitement dans le chenal de la Trinité puis celui du Denou de l’autre côté de l’île.

En discutant du problème des casiers forcément dangereux de nuit avec Stan, nous décidons de changer les plans. En sortant de Paimpol dimanche dernier nous n’avions pas vu un seul casier, car nous avions coupé le fromage direction le chenal de Saint Rion. Nous étions restés sur l’estran et il n’y a donc pas de casier sur l’estran. Juste au nord des casiers et au sud du chenal de la Trinité, il y a des chalutiers au coffre et quelques’uns sont libres. Nous dinerons donc là et couperont en biais pour retrouver l’alignement vers Paimpol et éviter les coffres.

Notre dernier repas à bord et le traditionnel jyfoutout sera copieux. Le retour vers Paimpol se fera sans problème au moteur, vent parfaitement dans le nez. Nous arrivons un peu avant la marée haute dans l’écluse, nous sommes les seuls. Avec un tel coefficient il nous faudra tout de même écluser même à marée haute.

Philippe nous fait une superbe manœuvre de port, merci Philippe de nous avoir donné l’occasion de rire.

Nous voilà de retour, mais le stage n’est fini, demain matin on se lève tôt et on fait quelques manœuvres de port. Réveil prévu à 7 heures, tu as qu’à croire, ça y est l’équipage est en vacances. Au lieu de deux heures de manœuvres on n’en fera qu’une. Pour punir Philippe de l’atrocité de la veille au soir, il nous fera la dernière manœuvre sous les rires joyeux de tous.

Tout le monde se remonte les manches, le bateau est nickel. Une bonne crêpe bretonne tous ensembles dans la vieille ville, et c’est le cœur serré que je repars vers Bordeaux.

Merci, Guillaume, Philippe, Bernard, Gérard et Stanislas pour votre compétence, votre bonne humeur, et la merveilleuse semaine passée en votre compagnie.

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