Qui a dit qu’aux Glénans les stages étaient intensifs, levé à 6 heures couché à 23 ?
J’ai dû l’entendre dire mais ce ne fut pas le cas cette semaine au départ de Concarneau. Certes j’avais imposé un lever à six heures le premier jour mais nous ne partîmes qu’à neuf heures. Le temps que tout le monde se décolle les paupières, aille à la douche, petit déjeune et se bouge… Les jours suivants furent une lente dérive vers la grasse matinée.
La semaine fut cependant très agréable, j’aime aussi la croisière cool et je peux me mettre facilement dans ce tempo si les circonstances l’exigent. Les prévisions nous promettaient un flux de nord est plutôt faible sous un soleil de plomb. Nous aurons effectivement un soleil de plomb et à part quelques rares passages pétoleux un flux régulier de quatre à cinq Beaufort tous les jours.
Pour le déjeuner du premier jour nous prendrons un mouillage au pied du phare des moutons sur l’île du même nom. Moins peuplé que celui de La Chambre au sud de Saint Nicolas c’est aussi plus agréable. Sieste sous le soleil ensuite, bien sûr.
Nous voilà repartis vers l’Est au bon plein sous un soleil ardent et une brise de force quatre. Nous longeons cette belle côte sud de la Bretagne et l’absence de cailloux pousse au farniente, certains prolongerons la sieste.
L’île de Groix est bientôt en vue, la visibilité est énorme, elle est à bien plus de dix miles, le vent tombe, nous jetons notre dévolu sur le petit port de Doélan. Un autre voilier de l’école est là tranquillement amarré tête et cul sur les coffres à l’entrée juste après la petite digue. Il vaut mieux être ici par vent de nord que de sud, si la houle rentre, cela doit être une jolie lessiveuse. Doelan le présente guère d’intérêt si ce n’est la halte pas flux de nord. La dîme est tout de même de seize euros pour un voilier de 31 pieds au coffre et lorsque nous demandons pour un peu d’eau il faut s’amarrer au quai en pierre et fait l’aller retour avec des jerrycans. Nous irons faire le plein à Port Tudy sur l’île de Groix.
Le plein d’eau ! Déjà me direz vous ! Et oui le bateau que je n’ai pas présenté est un Elan 310 et n’a qu’un réservoir d’eau de 70 litres. A six à bord cela va très vite. Nous serons plus prudents les jours suivants. Mais bon cela ne nous a pas vraiment gêné.
Donc lundi midi nous faisons escale à Port Tudy, pour le plein d’eau certes mais surtout pour un stagiaire qui a réussi a attraper une belle angine et se trimbale une fièvre carabinée. La visite chez le médecin de l’île sera très efficace, le lendemain notre matelot est déjà bien sur pied. Vers quinze heures nous larguons de nouveau les amarres pour la direction de Belle Île. Nous avalerons les vingt cinq miles jusqu’à Port Kerel en quelques heures. Cette baie est sensée nous offrir un bel abri calme par tous les temps d’ouest, nord et est, mais nous nous ferons remuer dans la nuit par un houle ou un ressac venu d’on ne sait d’où.
Le parcours entre les deux îles se fera au travers / portant avec un joli bord de spi après être passé le long du plateau du Birvideau et avoir abattu quelque peu. Nous filerons avec un bon quatre Beaufort le long de la côte sauvage jusqu’à qu’à force de vouloir lofer sous spi on dépasse une fois de trop la limite et de se prendre un joli départ au tas. Affalage musclé et retour à la normal après avoir bien penché. Tout le monde était prévenu du risque et s’accrochait, le barreur voulait voir, il a vu, c’est un peu plus lourd que sur un dériveur. La leçon est retenue. Le spi c’est facile mais il ne faut pas trop pousser. S’en suivra une discussion sans fin sur ce qu’il vaut mieux choquer en grand lors d’un départ au tas sous spi. Chacun y allant des ses arguments la discussion resta ouverte.
Ce fut aussi l’occasion de se rendre compte que ce bateau marche bien mieux au portant qu’au près sans avoir des performances de folie. J’étais globalement un peu déçu, avec sa poupe bien large j’avais espéré dépasser facilement les maigres huit nœuds que nous frôlerons sans jamais atteindre.
Après un départ assez tardif, nous repartons vers Lorient en faisant le tour par le sud et l’est de Belle Île. Il y a toujours du vent et les rayons du soleil nous pousse au tartinage de crème de protection. Une fois la pointe de Kerdonis dépassée au près serré nous abattons légèrement pour passer le long du Palais et de Sauzon et repartir vers le nord sur un seul bord. A partir de là, les prises de ris seront les seules manœuvres nécessaires de l’après midi.
L’arrivée à Lorient est l’occasion de faire un peu plus de navigation que les jours précédents. C’est l’occasion de se rendre compte que ce que l’on cherche n’est pas forcément là où l’on est persuadé que s’est. On tirera quelques bords dans le chenal et pratiquerons ainsi les alignements de sécurité recherchés spontanément sur la carte.
Mercredi sera le jour des dauphins sous spi. Partis de Lorient à la limite de l’après midi nous enverrons rapidement la bulle et entamerons une série d’affalages / envois / empannages jusqu’à ce qu’un équipier crie « Des dauphins ! » lâche tout et file à l’avant, le reste de l’équipage a suivi sauf le barreur coincé là par les exigences du moment (il aura sa revanche le lendemain). C’est impressionnant comme le stagiaire aujourd’hui réagi bien plus promptement au cri « Dauphins ! » qu’à celui de « Homme à la mer ! ». Il faut dire qu’à force de balancer un seau et un pare battage on sait bien que la vie de personne n’est jamais en jeu, à tel point que certains ne pointent même plus leur nez dehors. A méditer…
En fin de journée la pétole s’installe à quelques encablures de l’île de Penfret. La brise Volvo nous poussera finalement au mouillage entre cette île et celle de Gueotec. Un superbe endroit, une eau claire et plate. Nous gonflons l’annexe, embarquons quelques bières et un saucisson pour aller visiter l’île de Penfret que beaucoup à bord connaissent pour y avoir encadré. Pour moi c’est une première, c’est un coin agréable et sauvage, mais je trouve que s’est dommage d’y entasser deux à trois cent juniors l’été. Cela ne doit pas être très facile à gérer.
Jeudi est l’avant dernier jour du stage, certains veulent encore manger du spi, alors se sera près serré, spi, près serré, spi tout ce qu’il reste de la matinée. Ensuite repas et sieste dans la pétole à la cape. La brise thermique s’étant enfin installée nous ferons encore un long bord de spi jusqu’à Port La Foret. Puis une série d’HLM dans un bon 4-5 Beaufort. L’occasion de se rendre compte que ce bateau n’est pas fait pour le Quickstop. Impossible de le faire abattre une fois à la cape., il s’arrête, point barre. On a pris un ris pour voir, pareil. Bon comme on a le moteur ça a fini par un grand coup d’hélice pour y arriver. C’est peut être aussi dû au bi safran.
Nous rentrons pour la nuit à Concarneau, demain matin dernier jour du stage : « Manœuvres de port ». Cela exige de se lever tôt. A six heures je pars aux toilettes avec un stagiaire, à sept un autre pointe son nez. C’est décidé on allumera le moteur dès la fin du petit déjeuner et on verra bien qui sera sur le pont. Bizarrement tout le monde est là pour un petit topo.
Il y a un peu de vent d’est et cela pose question pour la sortie du catway. L’engin est un bi safran, il y a peu de place, c’est compliqué à penser, c’est encore pire à le faire. Les bi safrans sont une mode parce qu’il faut faire comme les grands, mais franchement c’est plus cher et cela n’apporte que des emmerdements. Bon … les bateaux ne sortent en moyenne que trois jours par an.
Nous voilà partis, on s’est mis d’accord avec le stagiaire qui tiens la barre, pleine balle en marche arrière pour prendre de la vitesse et être manœuvrant. Raté… le bateau ne tourne absolument pas. On a un mètre devant et un mètre derrière et le bateau dérive vent de travers dans la pane vers le fond sans pouvoir rien faire. N’ayant pas trop le temps de faire de la pédagogie, je prend la barre. Il y a un catway de libre sous le vent, par réflexe plus que par raison je pose la pointe du bateau sur ce catway, l’arrière continue à dériver et le bateau tourne enfin. Après c’est du gâteau. L’adrénaline et monté bien haut sur le coup, nous n’avons rien touché. Un bon débriefing sur la situation pendant le repas nous mènera à l’idée de poser une aussière entre la pointe avant et la pointe du catway. Cette aussière reprise au fur et à mesure que le bateau sort de sa traque nous aurait aidé à faire pivoter le bateau dans ce couloir étroit.
Ensuite nous choisirons des endroits assez large pour les exercices de manœuvre. Il n’y aura pas d’incident.
Un peu avant onze heures nous amarrons définitivement Kornog – c’est le nom du voilier – au catway ensoleillé au pied de la ville close de Concarneau.
Tout le monde se remonte les manches pour rendre un bateau impeccable. Avant treize heure nous sommes attablés sur une terrasse pour notre dernier repas ensemble.
Une semaine bien cool, du soleil, du vent que demander de plus.
Vivement la prochaine fois.
Bonjour,
J’étais sur Kornog la semaine dernière au départ de Concarneau pour un stage 3 Navigation (en tant que stagiaire), On est allé jusqu’à Morgat. Merci pour votre récit qui me sorte un peu de la vie parisienne et me ramène à cette croisière. L’Elan est un bon bateau, pas forcément facile pour les manœuvres de port car bi safran mais très agréable à la voile.