Pour le week end du 1er novembre dernier, nous avions passé trois jours sur l’eau avec Jean-François entre Hendaye et Zumaia. Entre coups de soleil, pétole et bonne brise nous avions passé un week end merveilleux à se faire plaisir sur l’eau et à déguster tapas et sangria au port le soir et poisson fraichement pêché dans le carré bateau.
Les bonites sautaient litéralement dans le bateau tellement il y en avait sous le bateau. Nous en avions ramené quelques unes chez nous pour prolonger le souvenir. Nous nous étions cependant rapidement arrêté de pêché car le frigo étant plein, et les sacs de congélation du bord étant épuisés nous ne pouvions raisonnablement pas en ramener plus.
Un peu comme des gamins devant une montagne de bonbons et qui une fois les poches pleines sont obligés de rentrer chez eux en laissant derrière eux cet océan de plaisir.
Ce week end nous avions tout prévu… Nous n’allions pas nous faire avoir par un défaut de logistique et le congélateur promettait d’être plein dimanche soir. Les cannes étaient affutées, les couteaux en place, les chaussures qui ne craignent pas le sang au pied. Un drame allait se jouer. Remontés comme des pendules Jean-François et moi nous étions mués en prédateurs. Tel Hulk nous avions changés de peau et le monde ne serait plus le même après.
Samedi matin, en tee-shirt et sous le soleil nous envoyons les voiles dans la baie d’Hendaye à la sortie du chenal. Bien vite la première canne de traine est en fonction alors que le bateau file déjà bon train et cela ne tarde pas, ziiiiiii, le moulinet s’affole, je me précipite. Houlà cela tire comme un fou. Je mouline et ramène la bête en pompant, un joli bar !!! Une superbe introduction. Le week end s’annonçait merveilleusement bien. Voilà déjà notre repas du soir garanti, de quoi faire quelques jaloux et surtout de quoi se régaler. Nous reprenons notre route direction l’Espagne, nous verrons bien où le vent nous portera.
Une fois le bateau sur son cap, nous établissons une deuxième canne sur babord et une ligne avec planchette au milieu de la jupe du voilier.
Le vent est erratique, un coup force 4-5, un coup rien, un coup des rafales pendant dix minutes et il nous faut réduire la toile, puis il nous faut tout renvoyer dans l’instant qui suit. Même mes stagiaires aux Glénans ne subissent pas un tel enchaînement de manoeuvres, cela nous fait les bras, enfin… je dis nous … c’est plutôt Jean-François qui s’y colle. Car Petra est à la barre et moi je surveille les cannes à pèche au cas où. Autant dire que je ne fais rien… De temps en temps je tire sur un bout histoire de ne pas trop culpabiliser.
Parce que question pêche, à par le bar et une belle orphie qui sont venus se suicider sur nos hameçons, nous faisons choux blanc. Nous sommes sans doute partis trop tard et c’est comme il y a trois semaines, l’approche du soir devrait réveiller nos amis à écailles et les faire se précipiter sans ménagement sur nos leurres affutés pour l’occasion. La patience est la qualité principale du pêcheur, et nous en avons une bonne dose.
Nous navigons toujours en tee shirt et il nous faut nous pincer pour réaliser que nous sommes le 22 novembre, que chez nous il a plu pendant presque trois semaines et que du bois brulait dans la cheminée presque chaque soir.
Entre pétole et rafales, nous laissons San Sebastien à babord et jetons notre dévolu sur le petit port pitoresque de Gétaria, c’est à quelques miles et nous devrions arriver juste à la nuit en ayant précédemment rempli les cales des bonites attendues. D’ailleurs nous voyons sortir toute un flotte de petits bateaux, preuve que nos amis à nageoires seraient assurément au rendez vous.
Le miles s’égrainent à une vitesse bien plus grande que les thonidés encombrent le frigo. Les questions commencent à se poser… changer de leurre ? Traîner plus loin ou plus prêt du bateau ? Nous n’avons pas de réponse.
Bon, le port est là, demain matin nous partirons plus tôt et là, au lever du jour les poissons seront à nous et les cales seront forcément pleines.
Nous allons nous balader dans la ville, jusqu’au point le plus haut d’où nous admirons la baie et le ciel flamboyant ; mais aussi cette immensité liquide, promesse d’une pêche miraculeuse le lendemain.
En redescendant vers le port nous nous asseyons sur une terrasse devant le port et la rue qui s’anime. Nous appréçions bien sûr une sangria avant de nous rendre au bateau pour la dégustation du bar du jour. Le manœuvres à répétition de cette journée ont fortement entamé notre potentiel et nous commençons à être salement fatigués. La température étant tellement clémente nous décidons de dîner dans le cockpit. Nous dégustons le bar et aussi une rillette de bonite que j’avais préparé la veille. Cette rillette nous donnait déjà le goût de la pêche du lendemain.
C’est très tôt que nous sommes tombés, ce soir là, dans les bras de Morphée.
Dimanche matin, nous voilà d’attaque, après un petit déjeuner en terrasse sous le soleil naissant nous largons les amarres. Les cannes en place je file les lignes de traine même avant d’envoyer les voiles. Nous voilà prêt pour le carnage.
Les prévisions nous anoncent un vent de sud, cela tombe bien, nous allons tranquillement rejoindre Hendaye, bateau à plat ou presque sur cette allure confortable. Nous voilà partis, éole joue avec nous, un coup prềs serré, un coup vent arrière, un coup sud, un coup nord. Et nous à la manœuvre. C’est sans doute le relief de la côte qui nous joue des tours, de toute manière nous n’avons qu’à prendre notre mal et patience et faire avec. Entre risée volvo et des rafales à six beaufort, nous nous faisons les bras sur les écoutes et les enrouleurs.
A la manœuvre, nous ne pensons pas trop à la pêche. Nous faisons un peu exprès pour ne pas tomber dans la déprime complète. Assez souvent le bateau file bon train et Petra décrète que pour elle c’est sept nœuds sinon rien quand elle barre. Chose qui se vérifie au fil des heures qui passent plus vite que les bonites n’accrochent nos fichus hameçons.
Encore une fois nous nous pinçons dans ce vent chaud venu des terres un 23 novembre, c’est incroyable, nous sommes à peine couverts et avons chaud. Les payages sont magnifiques et les lumières exceptionnelles. C’est un régal.
C’est dans ces conditions changeantes que nous nous activons et abordons le cap Figuier signe de la fin de notre périple. Encore quelques bords dans ce vent fort sur l’eau plate de la baie et nous embouquons le chenal après avoir remonté les lignes de traîne.
Nous avons encore passé deux journées merveilleuses.
Seules les bonites ont manqués au tableau. Nous nous sommes longtemps intérrogés sur les raisons de ce fiasco, mais qu’importe. Il nous reste 44 sacs de congélation à bord pour la prochaine fois. Nous avons rangé notre panoplie du parfait prédateur. Notre mue Hulkienne a été rangée pour les fêtes. Nous la ressortirons dès que possible.
Sur la route du retour nous avons encore beaucoup ris sur l’enthousiasme halieutique qui nous habitait à l’allée. Les belles bonites reviendrons l’an prochain et nous y serons c’est promis…
A suivre …