Convoyage Péniche – Palma de Majorque

(Récit du convoyage d’Alienor VI, un Gibsea 43, du 25 juin ai 1er juillet 2011)

Bonjour à tous,

Un petit email à tous pour essayer si cela fonctionne depuis le bateau. A priori il ne devrait pas y avoir de problème.

Ce matin mardi 28 juin à 7h30 nous avons passé Tarifa. Nous sommes donc en méditerrannée.
Gibraltar est vraiment la porte du paradis.

Après s’être fait secoué toute la nuit nous voilà dans la pétole avec une mer plate et du soleil à gogo.

Pendant que j’écris cet email un maquereau vient de mordre à la traine.

Depuis notre départ samedi de Peniche à 13h00 nous avons eu des conditions très changeantes. D’abord rien jusqu’à l’embouchure du Tage.

Puis un bon 4 nous faisait filer sous spi jusqu’à 8 noeuds.
La première nuit s’est ensuite passée mi à la voile, mi au moteur.

Le cap saint vincent nous a accueilli avec un bon sud est 6 à 7 puis plus loin c’est complètement tombé.  Nous nous sommes alors retrouvé sans vent et sans moteur car le refroidissement refusait de cracher. Deux heures plus tard et après avoir démonté pas mal de chose nous avons réussi à repartir.

Environ à mi chemin entre St Vincent et Gibraltar, le vent est revenu presque sur le bon cap. Nous avons fait de la voile jusqu’à Cadix puis moteur pour revenir dans l’axe du détroit. En début de soirée, le vent descendait régulièrement, nous étions sous voile en s’appuyant au moteur. Alienor n’est décidément par un bateau pour faire du prés.

Jusqu’après le cap Trafalgar les conditions étaient bonnes en cap et en vent moteur et gv seule appuyée. Après les conditions se sont musclées mais le phare de Tarifa était là devant nous à nous attendre presqu’à portée de main. Nous avons louvoyé toute la nuit par 25 à 30 noeuds de vent apparent. La visibilité était bonne et les cargos rares.
Enfin à 7h30 nous laissions le rocher de Tarifa par le travers. Aussitôt la mer s’est calmée puis bien vite le vent est tombé.

Pour info pour les chefs de bord, j’ai vérifié l’arrivée d’eau par la vanne, j’ai vérifié le fonctionnement de la pompe en débranchant la sortie de la pompe et en démarrant le moteur (filtre à eau de mer vide) la pompe a bien amorcé. J’ai fait redémarrer le moteur avec ce tuyau débranché puis aussitôt que cela crache, j’ai rebranché le tuyau. Et cela a fonctionné. Lorsque nous arrêtons le moteur, nous fermons la vanne d’arrivée d’eau. Cela a fonctionné depuis.

Je vous souhaite à tous une très bonne soirée lors de notre réunion hebdomadaire.

Nous prévoyons une arrivée à Palma vendredi dans la journée.

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Vendredi 1er juillet 2011 à 18h19

Mallorca !!!

Depuis quelques heures déjà nous sommes en vue de l’île tant attendue. Ce matin nous traversions le  petit passage entre les îles d’Ibiza et de Formentera. Ce fût tout simplement magique, un lever de soleil éclatant, une porte vers le dernier bord. Enfin, nous allions retrouver Michel, Maryse, Isabelle, Karl et Petra. Une soirée joyeuse se profilait là bas à l’horizon.

Evidemment depuis Gibraltar, le vent n’a pas vraiment été ce qu’on pourrait qualifier de favorable. Quelques bords dans la baie d’Almeria pour passer le magnifique cap Gata et cette après midi sous spi grâce au thermique de Majorque. Le reste du temps se fût au moteur à sec de toile ou sous GV seule. Encore maintenant à trois heures de Palma, le moteur nous aide pour ne pas finir en milieu de nuit.

Je crois que tout le monde à bord est un peu triste que notre aventure s’arrête là.
L’ambiance fût il me semble très bonne, Hugues mon second a fait un super boulot. Elisabeth, toujours sérieuse est une équipière sûre et expérimentée. Jean-Pierre et Bernard que je ne connaissais pas s’avèrent aussi sérieux et sûrs.
Et surtout, surtout, que le bateau soit à plat au moteur dans la pétole ou chahuté dans deux à trois mètres de creux, l’ambiance a toujours été excellente. Ca c’est vraiment ce qui m’a le plus plû pendant cette semaine.

Le lôt d’anecdotes est pléthorique. Devant Almerimar nous nous sommes arrêtés au beau milieu d’un banc de dauphins globicéphales d’une centaine d’individus de 200 à 300 kilos. Arrêtés à cotés de nous, ils nous regardaient, se frottaient les uns aux autres, passaient lentement sous la coque, lâchaient des bulles sous l’eau, nous étions hallucinés. Ils tapaient de la queue et des nageoires sans doute pour se marrer de ce pare battage resté sur tribord depuis ce matin. On les a imaginé se foutre de notre gueule : « Ha ! Ha ! Ha ! T’as vu fiston les touristes !!! »
Puis se furent les tortues, les dauphins et aussi les orques.
Le détroit est un tel goulet entre deux mers aux caractéristiques si différentes qu’il doit brasser pas mal de plancton et de vie. Pas étonnant d’y voir autant de grands mammifères marins.

Depuis Gibraltar, tous les jours, une belle bonite s’est invitée à notre table. Les excellents cuisiniers du bord leur ont offert des robes de légumes colorés ou de marinades sur tranches de carpaccio.

Rien n’a manqué cette semaine sauf peut-être le lait. Persuadé que nous étions d’avoir vu un pack sur le chariot à Peniche. Pour Jean-Pierre, il sera temps d’arriver car le chocolat au lait lui manque trop. Comme nous avons sentis que cela le faisait souffrir nous n’avons jamais insisté bien sûr. Donc si vous le voyez au bar, offrez lui s’il vous plait un verre de lait, cela lui fera tant plaisir. Timide, il n’osera jamais vous le demander.

Je vous ai déjà raconté nos problèmes de moteur. Mardi, ce furent des problèmes de frigo. Jean-Pierre, l’électricien du bord, a d’abord trouvé un fil débranché, mais la remise en place de celui ci ne fût pas couronnée de succès. Cela s’est remi en marche tout seul quelques heures plus tard. Je vous passe toutes les théories que nous avons élaboré à ce sujet.

Mercredi soir à la tombée de la nuit, c’est le pilote qui se met en erreur et nous oblige à barrer toute la nuit vent debout. On a bien essayé quelques trucs mais sans succès. Le lendemain matin vers dix heures je rebranche et il remarche. Personne n’y comprend rien. A la tombée de la nuit rebelote : pilote en vrac. Et ce matin à 10 heures il remarche: un vrai fonctionnaire. Eh !! Raymond !! T’es pas aux 35 heures, le boulot c’est du plein temps 24 heures sur 24. Mais ce con de Raymond n’entend rien, il se barre se coucher.

Enfin ce qui nous inquiète le plus sont les chutes de tension observables par les baisses d’intensité des éclairages des instruments et du carré.
Il y a des trucs bizarres sur le plan électrique : si on appuie sur le testeur de charge des batteries, c’est la jauge à gazoil qui s’anime. Y a des trucs à revoir.
Là aussi je vous passe les théories.

Nous n’avons tout de même pas passé notre temps à bricoler. Beaucoup de pages de littérature également ont été tournées. L’équipage s’est initié à l’art du matelottage décoratif et de quelques noeuds compliqués.

J’ai l’impression d’être parti depuis un mois. Je suis partagé entre l’envie folle de revoir Petra et celle prenante de rester en mer. Comment vais je faire pour mettre un pied devant l’autre normalement.

21 heures : L’équipage montant nous attrape les aussières. J’arrête le moteur. C’est fini. Une page s’est tourné. C’était mon premier convoyage.

21h30 : Apéritif tous ensembles puis resto tous ensembles. Il ne faut pas perdre les traditions.

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